vendredi 10 novembre 2017

BENDY AND BORIS, CHAPITRE 19

Bien le bonjour, tout le monde !

Nouveau chapitre ! Chapitre un peu spécial car il contient, à mes yeux, l'une des plus belles et fortes scènes du webcomic. J'espère que j'ai réussi à vous retranscrire toute l'émotion de ce passage que je trouve important dans la construction de nos deux héros principaux. Si tel est le cas, n'hésitez pas à me le dire en commentaire !

Bonne lecture !




Quand Mugman et Cuphead rejoignirent leurs compagnons de route, Félix leur jeta à chacun une pomme. Les deux frères les rattrapèrent habilement, surpris par cette soudaine offrande. Le chat croqua dans son propre fruit.
-       Où est-ce que vous traîniez, les gars ? leur demanda-t-il, taquin.
Boris, de son côté, mangeait tranquillement, profitant du soleil. Bendy croqua à son tour dans la pomme. Il s’attendait à ce qu’une saveur acidulée explose dans sa bouche, mais, au lieu de cela, ce fut le goût de l’encre qui envahit sa langue. Un long frisson parcourut son corps alors qu’il comprenait avec horreur que l’Inkness avait lancé son nouvel assaut.


Précipitamment, le mécanicien dissimula ses lèvres noircies. Il laissa tomber le fruit afin de nul ne voit la chair poissée par l’encre.   
-       Monsieur F… Félix, balbutia-t-il d’une voix faible, p… pouvons-nous prendre une pause, s… S’il vous plaît ?
-       Déjà ? s’étonna le chat.
Au regard du malade et à sa respiration sifflante, l’écrivain comprit instantanément de quoi il en retournait.
-       Oh ! Je veux dire, bien sûr, s’empressa-t-il de se rectifier.
Bon sang, il avait déjà oublié… Bendy le remercia d’un signe de tête avant de se mettre à courir pour s’éloigner le plus vite possible. Boris lui emboîta aussitôt le pas en lui criant de l’attendre. Mugman, qui était en train de manger sa pomme, les regarda s’en aller d’un air surpris. Bah ? Qu’est-ce qui leur prenait, tout à coup ?
-       Où est-ce qu’ils vont ? demanda-t-il. 
-       Ils reviendront, lui répondit douloureusement Félix en suivant les deux frères du regard. Attendons-les simplement… 
Boris venait de sortir de son champ de vision en disparaissant derrière un rocher. Là, il retrouva son frère, appuyé contre la paroi pierreuse, ahanant. L’encre avait commencé à couler le long de son visage et sur son corps tremblant, agité de soubresauts incontrôlables. Le louveteau se précipita vers lui, terriblement inquiet. Il n’osa pas le prendre dans ses bras, comme s’il avait peur de le voir s’effondrer au moindre toucher. Quand il vit son frère tenter de s’éloigner encore de leurs compagnons, il ne put le laisser faire.  
-       Bendy, on est assez loin, s’il te plaît, repose-toi ! le pria l’apprenti mécanicien. Tu ne peux plus marcher !
Le malade répondit par une horrible quinte de toux. Salive, larmes et encrs se mêlaient sur son visage dans un cocktail des plus répugnants. Bendy s’agrippait de toutes ses maigres forces au rocher, tremblant, apeuré. Non… Non, non ! La douleur le frappa au niveau de l’estomac et le mécanicien se laissa glisser à terre en gémissant.
-       Pitié, Boris ! le supplia-t-il. Emmène-moi encore loin d’ici ! Je veux que personne ne me voit dans cet état, surtout pas monsieur Félix !


*

Félix, Mugman et Cuphead s’étaient installés en attendant les deux mécaniciens. Le nervi du Diable croquait tranquillement sa pomme sans se préoccuper de l’écrivain qui tentait depuis plusieurs minutes déjà d’engager la conversation.
-       Alors, essaya-t-il, une nouvelle fois, on m’a dit que vous pouvez tirer des lasers avec vos… doigts ?
-       Ouais ! répondit avec enthousiasme Mugman.
Oh, pour de vrai ? Incroyable !
-       Ça vous dérangerait de me montrer ? leur demanda le chat avec un sourire d’enfant émerveillé.
-       Montre-lui, frangin ! s’exclama Mugman en s’adressant directement à son aîné.
-       Pourquoi moi ? grogna l’intéressé. Quel ennui…
Il sut qu’il n’avait pas le choix en constatant que ces deux compagnons ne le lâchaient pas du regard, tous deux tout sourire. Il poussa un soupir, mais consentit à céder à leur requête. Il se redressa et pointa un doigt devant lui. Une lumière bleue apparut au niveau de son ongle alors qu’il se concentrait. Ne pense à rien, s’enjoignit Cuphead, ne pense à… rien… Dans un flash rouge, le corps perforé de Mugman lui revint à l’esprit. Ses yeux éteints, son sang qui formait des rigoles entre les pavés, son corps qui reposait sur le sol, poupée de chiffon déchirée.
Rouge, rouge, rouge !

 
La lueur s’évanouit aussi vite qu’elle était apparue. Cuphead recula d’un pas et s’efforça de cacher son trouble de son mieux. Il trouva la force de sourire de manière suffisante.
-       Tu sais quoi ? Le mien est déjà plutôt incroyable. Pourquoi tu ne travaillerais pas le tien, Mug ? le taquina-t-il.
-       Oh, allez, râla son benjamin.
Cependant, il ne protesta pas longtemps car c’était là pour lui l’occasion de démontrer l’étendue de ses talents ! Mugman se posta à la place de son aîné et tendit un bras devant lui. Sa main libre se posa dans le creux de son coude pour qu’il verrouille sa position. Qu’est-ce qu’il allait viser ? Ah, la pierre là-bas ! Le plus jeune des deux frères ferma un œil afin de se concentrer puis fit glisser un bout de sa langue hors de ses lèvres. Il souffla afin de faire le vide dans son esprit, comme lui avait appris Cuphead quand il lui avait donné des leçons de tirs. Vise, vois la cible… et tire !
Le rayon bleu explosa au bout de son index et fila à toute vitesse ! Il atteignit la pierre ciblée qui éclata sous l’impact. Son aîné, qui s’était recroquevillé sur lui-même lors du tir, effrayé par la violence de la détonation, fit une nouvelle fois de son mieux pour sourire à son benjamin qui était particulièrement fier de sa démonstration de force.


-       Beau t… tir, le complimenta-t-il en maudissant sa voix chevrotante.
Heureusement pour lui, Félix détourna l’attention de Mugman en le complimentant de vive voix, fasciné par son pouvoir. Il se mit à le questionner vivement. Comment avait-il acquis ce don ? Comment faisait-il pour tirer ? Suffisait-il qu’il se concentre ? Il avait tant de questions, c’en était étourdissant ! Cuphead en profita pour s’éloigner de quelques pas, au bord de la nausée. L’image du corps de son benjamin ne quittait pas son esprit. Bon sang, et si… !
Et s’il n’était plus jamais capable d’utiliser son pouvoir ?

*

Boris avait obligé Bendy à s’asseoir et à se déshabiller afin qu’il puisse s’occuper de lui. L’encre avait presque entièrement recouvert l’entièreté de son visage sous son flot noir et visqueux, formant une sorte de masque mouvant. Le louveteau avait installé une bassine d’eau savonneuse près de lui afin de nettoyer cet amas de matière épaisse. Ses mains tordirent le linge afin d’en enlever l’excédent d’eau. En entendant le liquide ruisseler, Bendy poussa un soupir.
-       Pas besoin de ça, Boris, déclara-t-il d’une voix fatiguée. Je vais t’en mettre partout… Attends juste que ça se nettoie tout seul.
Le louveteau leva les yeux au ciel. Qu’est-ce qu’il ne fallait pas entendre… Il passa un bras autour des épaules de son frère pour l’obliger à se rapprocher de lui.
-       Est-ce que ça a réellement de l’importance, maintenant ? Arrête de dire des idioties pareilles et viens ici.
Il passa le tissu humide sur le visage du mécanicien afin de le laver. Bendy, au contact du linge froid, gémit légèrement. Boris sentit son cœur se serrer. A travers le textile, il pouvait sentir la chaleur excessive qu’émettait le corps du malade.


Doucement, avec des gestes qu’il avait perfectionné à mesure des crises, il nettoya les méfaits de l’Inkness. L’eau de la bassine devint rapidement noire comme une nuit sans lune. Quand, enfin, la douleur se calma, l’encre cessa de couler. La respiration de Bendy s’apaisa à son tour. Epuisé, le mécanicien ferma les yeux pour se laisser dorloter par son benjamin. Celui-ci se glissa dans son dos et l’obligea, d’une pression sur les épaules, à s’appuyer contre son torse. Ses bras enlacèrent le corps menu du malade pour le bercer, le temps d’une étreinte. Un silence cotonneux s’installa entre les deux frères unis par des liens tellement plus forts que celui du sang.
Le louveteau prit une profonde inspiration. Ça y est, le pire était une nouvelle fois derrière eux. Ce ne serait pas pour aujourd’hui, pas encore.
Bendy avait encore vaincu.  
-       B… Boris ?
La voix du mécanicien était faible, amenuisée par la lutte. L’intéressée répondit par un simple bruit de gorge, juste pour signaler qu’il était à l’écoute. Bendy rouvrit alors les yeux, encore étourdi par ce qu’il venait de traverser.
-       Tu peux me promettre quelque chose ? souffla-t-il.
-       Quoi donc ?
-       Promets-moi que tu continueras à chercher les pièces de l’Ink Machine, même après ma mort.


Tous les muscles du corps du louveteau se tendirent. Q… Quoi ? Il avait mal entendu, n’est-ce pas ? Sans se rendre compte du trouble qu’il venait de provoquer chez son jeune frère, Bendy poursuivit :
-       Nous faisons ça pour sauver tout le monde, pas seulement moi.
-       O… Ouais, bien sûr.
Non, non, non… Ils ne pouvaient pas être en train d’avoir cette conversation. C’était impossible, l’apprenti mécanicien s’y refusait de toutes ses forces. A ses yeux, plus rien n’existerait après la mort de Bendy, non, plus rien. C’était normal, après tout, son frère ne mourrait pas avant de longues, très longues années !… N’est-ce pas ?
Bendy remua contre son torse. Il lui adressa un regard fatigué, décontenancé par son manque de réponse.
-       Alors, vas-y… Promets-moi, l’encouragea-t-il.
-       Tu iras bien.
Bendy fronça les sourcils. Ce n’était pas la réponse qu’il attendait… 
-       Boris ! gronda-t-il.
-       Tu ne vas pas mourir.
Le mécanicien se redressa brusquement pour faire face à son benjamin. Non, pas cette fois-ci ! Cette fois-ci, il la lui arracherait, cette promesse ! Il ne se laisserait par attendrir ni par ses larmes, ni par ses protestations ! Il avait besoin de cette assurance pour pouvoir partir un tant soi peu en paix. 
-       Boris ! Promet-moi ! lui cria-t-il, un soupçon de désespoir dans la voix.
-       Tu ne pas vas pas mourir ! hurla le louveteau en réponse.


Les larmes dévalaient désormais les joues de l’apprenti mécanicien. C’était trop cruel, bien trop cruel ! Jamais il ne pourrait prononcer de tels mots. Bendy ne se rendait-il donc pas compte de l’horreur de sa demande ?! Mais celui-ci était loin de vouloir céder.
-       Tu as une équipe à guider ! tenta-t-il de le raisonner.
-       « Nous » avons une équipe à guider ! corrigea violemment le louveteau.
-       Ce sera le cas une fois que… !
Une fois que l’Inkness m’aura tué.
Non !
Non, non, non ! Il ne voulait rien entendre ! Boris plaqua précipitamment ses mains sur ses oreilles. Il ne l’entendrait pas, jamais !
-       La, la, la, la ! Je n’entends rien ! gueula-t-il pour gommer les mots de son frère, ces insupportables petits couteaux.
Le mécanicien savait qu’il était inutile de continuer dans cette voie. Plus il monterait le ton, plus Boris se fermerait. Il tenta une autre approche, plus calme, plus douce.  
-       D’accord, je ne crierai plus, Boris, lui assura-t-il d’une voix apaisante. Mais j’ai toujours besoin de savoir si… 
Il s’interrompit lui-même, frappé par l’image qui s’offrait à lui. Son petit frère s’était recroquevillé sur lui-même, pleurant, tremblant. Un pauvre enfant, un simple gamin. Mais qu’est-ce qu’il lui infligeait… ? Il n’avait que douze ans… 


A son tour, le mécanicien sentit les larmes lui monter aux yeux. Pourquoi devait-il faire tant souffrir la personne qu’il aimait le plus au monde ? Bien sûr qu’il avait conscience de la monstruosité de sa demande ! Mais il aurait tant aimé avoir l’assurance qu’un jour, le jour fatidique de sa mort, Boris aurait quelque chose pour le porter, l’aider à traverser son deuil. Qu’il parviendrait à réparer la machine et ainsi empêcher que d’autres tragédies comme la sienne se produisent à travers le monde !
Il avait besoin de le savoir… Mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui, il était encore là. Et il ne souhaitait pas utiliser le temps qui lui restait pour blesser son frère. Il l’attira contre lui et nicha sa tête dans le creux de son épaule.
-       Mon petit frère… Je suis tellement désolé… 


Il ignorait pourquoi il s’excusait exactement. Pour être malade ? Pour l’avoir entrainé malgré lui dans cette quête insensée ? Pour avoir crié ? Peut-être tout cela à la fois… Bendy resserra son étreinte et se mit à chuchoter des paroles douces pour apaiser les pleurs de Boris. Ah… Son cher petit frère au cœur si tendre… Qu’il l’aimait, ce loup trop sensible, trop pur pour ce monde.  
-       Ça va aller, lui promit-il. Chut, tout ira bien, tu verras… 
Au final, c’était toujours lui qui finissait par faire des serments sur l’avenir. Peut-être, qu’ainsi, il parviendrait à conjurer le destin. Peut-être, oui, peut-être, que c’était une manière de repousser l’inévitable.
Alors… Promettons ensemble, Boris. Demain, demain et encore demain, jurons que nous vivrons.
Et vivons jusqu’à la fin des temps.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Beau chapitre, plein d'émotions