dimanche 10 août 2014

FICTION PARTICIPATIVE, CHAPITRE 9

L'histoire va prendre ici un tout nouveau tournant avec l'arrivée d'un nouveau personnage ! J'espère que vous aimerez !





Quand Arhzel reprit connaissance, la première chose qu’il vit fut un bec d’un noir aussi profond que celui d’une nuit sans lune.
-                Sale piaf, grogna-t-il à l’intention du corbeau juché sur sa poitrine.
L’intéressé émit un croassement sonore avant de s’envoler à tire d’ailes vers son perchoir. Arhzel grogna, une paume de main plaquée contre son front chaud. La fièvre ne tarderait pas à s’envoler, ainsi que l’engourdissement qui tenaillait son corps.
-                Torja.
Son secrétaire fut instantanément auprès de lui.
-                Oui, monseigneur ?
-                Raconte-moi ce qui s’est passé.
Arzhel tendit une main pour qu’il l’aide à se redresser. Encore instable sur ses jambes faibles, le vampire se laissa guider jusqu’au siège de son bureau. Torja se recula de quelques pas une fois que son maître fut assis.
-                Ce que vous allez entendre ne va pas vous plaire, le prévint-il.
-                Dis toujours, soupira l’intéressé en cherchant, dans son compartiment secret, ses griottines. Ah, les voilà. Je t’écoute.
-                Macaire est revenu.
Une grimace de mépris tordit le visage du vampire. Macaire… Un nom honni par toutes les femmes de son harem. Un client tordu aux goûts extrêmes, mais régulier et bon payeur. Sa préférence penchait plus pour Jaide ces derniers mois, pour le plus grand dégoût de la jeune femme.
Mais les règles du harem étaient claires. Les femmes appartiennent au maître des lieux, on ne peut coucher avec elles. Macaire a voulu passer outre cette loi tacite et pour pouvoir faire Jaide sienne, il l’avait enlevée. Arhzel était entré dans une colère monstrueuse et n’avait pas hésité à faire appel à ses privilèges et faire jouer ses connaissances pour retrouver la jeune femme. Pas qu’il ressente un particulier attachement envers elle, mais elle demeurait sa propriété. Et il était hors de question que ce salopard la souille… 
Finalement, Jaide avait été sauvée à temps et les brigadiers s’étaient fait un plaisir de mettre sous les verrous cette crapule.
Pas très solides, leurs verrous, apparemment…  
-                Il a cherché à s’approcher de Jaide, continua à relater Torja, mais nous étions près d’elle. Alors Macaire a sorti un couteau, fou de rage, et a tenté de vous poignarder, estimant que vous étiez la cause de son déshonneur.
-                Cet homme s’est déshonoré seul, répliqua calmement Arhzel. En s’en prenant à Jaide, il s’en est pris à moi et, par conséquent, aux Cadillac. Nous ne pouvions pas laisser passer une telle insulte.
-                Je le sais, monseigneur… Quoiqu’il en soit, il vous a donné un coup de couteau en pleine poitrine… sous les yeux du harem tout entier ainsi que de quelques clients.
Oui, voilà le problème… Un homme ordinaire serait assurément mort sous l’assaut de Macaire. Sauf que lui était un vampire. Si la scène s’était déroulée en huis clos, il n’aurait pas de soucis à se faire, mais des témoins avaient été présents. Des témoins avaient vu le poignard déchirer son torse, son sang jaillir telle une hideuse fontaine.
-                Et merde ! jura-t-il en frappant de ses poings le plateau du bureau.
-                Et ce n’est pas tout, ajouta tranquillement le secrétaire à la voix monocorde.
-                Quoi, encore !?
-                Pour que vous puissiez vous régénérer, il est d’ordinaire que je vous donne à boire de mon sang, mais là… Vous avez mordu Jack.
Hébété, Arhzel considéra son auto proclamé bras droit avec un air hagard. Ben non, il n’avait pas l’air de plaisanter ! Pourtant, cela ressemblait cruellement à une blague douteuse… 
-                Tu veux rire ?!
-                Vous devriez vous en souvenir, non ?
Je t’en empêcherai, je te jure que je t’en empêcherai !
Arhzel prit brusquement son crâne entre ses mains. Cette voix d’enfant… Ah !
La prochaine fois, tu ne seras pas seul. Je serais avec toi. Un visage d’homme qui  flottait devant ses yeux. Une sirène stridente noyée dans les couleurs bleues d’une ambulance.
Merci d’avoir un peu égayé ma morne journée, mais le divertissement s’arrête ici.
-                Ah… Je m’en rappelle, ricana le vampire. Un sang de pur menteur, du grand cru. 
-                Que devons-nous faire de lui ? l’interrogea Torja. Je ne l’ai pas encore éliminé, mais je… 
-                Non, n’en fais rien. Nous avons un problème autrement plus important sur les bras. Si des témoins m’ont vu “mourir”, nous n’avons plus que deux possibilités : faire croire que ma blessure n’était pas si grave que cela ou me faire véritablement passer pour mort.
-                Je ne pense pas que la première option soit possible.
-                Pourquoi donc ?
-                Votre belle famille vous a déjà statué décédé et Mademoiselle Cadillac a déjà reçu de nombreuses demandes en mariage de tout le pays.
Arhzel lorgna méchamment son bol de griottines. Il le saisit à deux mains avant de l’incliner au-dessus de sa bouche pour recueillir un maximum d’alcool et de cerises dans sa bouche sous le regard surpris de son secrétaire. Une fois qu’il eut tout avalé, le vampire passa son poignet sur ses lèvres.
-                Bon ! déclara-t-il. Je suis mort officiellement, alors. Je n’ai pas d’autres choix que de disparaître.
Son regard s’assombrit. Alors c’était ainsi que s’étaient déroulées les choses. La famille Cadillac connaissait sa nature, tout du moins, les membres les plus influents. Mais ils avaient profité de cette occasion de l’évincer. Ils ne désiraient pas voir le propriétaire d’un harem salir le nom de leur illustre maison.
-                Quelle bande de chacals… souffla-t-il.
-                Dania vous a défendu jusqu’au bout, lui assura Torja. Elle continue à refuser toutes les demandes en arguant qu’elle reste votre fiancée.
-                Pas étonnant. Si elle ne m’a jamais aimé de l’amour brûlant de l’amant, elle a toujours vu en moi le grand frère protecteur que n’étaient pas ses aînés. Elle reste encore à cette heure ma plus précise alliée… Que va devenir le harem ?
-                Les Cadillac ont jugé qu’il ne respectait pas la dignité de l’être humain. Ils vont le raser, monseigneur.
-                Ils vont donc aller jusque-là… Où sont les filles ? Et les domestiques ?
-                Vendus, pour la plupart. Certains ont refusé de partir d’ici, même si on leur promettait de meilleurs traitements. Les Cadillac n’ont pas tenus à ce que leur traite fasse du bruit, alors ils les ont laissés là, enfermés dans une cave. Ils prétendront probablement qu’ils ne savaient pas que des personnes étaient restées et déclareront qu’elles sont mortes lors de la destruction du bâtiment.  
-                Quand débute la destruction ?
-                Une heure. Les Cadillac m’ont chargé de vous informer de tout cela à votre réveil. Ils souhaitent que vous soyez raisonnables et que vous partiez rapidement. Pour votre propre bien, ont-ils ajouté.
-                Mais oui, mais oui. Qui reste-t-il ?
-                Jack, Séchar, Marlyne et Jaide.
Arhzel s’absorba un court instant dans ses réflexions. Où pourrait-il se rendre ? Après tout, il n’avait aucun endroit où se rendre, aucun lieu qu’il pourrait appeler maison. Même ce harem, il n’y était pas attaché. Il n’avait, en réalité, qu’un seul objet auquel il tenait, mais il se trouvait dans la demeure principale des Cadillac, loin d’ici, à l’autre bout de la mer… 
Mais bon, puisqu’il était mort, pourquoi ne pas s’y rendre ?
Il eut un ricanement. Il était déjà mort officieusement lors de sa transformation en vampire, mais c’était la première fois qu’on célébrerait des obsèques en son honneur ! 
-                Torja… Tu demeures à mon service ?
-                Les Cadillac ont refusé de me racheter, expliqua tranquillement le secrétaire. Ils disent qu’ils n’ont pas besoin d’un serviteur du Malin dans leur demeure.
-                Parfait. Tu vas aller délivrer les prisonniers de la cave. Pendant ce temps, je vais aller rendre visite à une vieille connaissance.
-                Une vieille connaissance, monseigneur ?
-                Oui… Un vieux loup de mer.

Une impression désagréable, un corps aux membres lestés de plomb. Un mal de tête qui vrille les temps, une langue en papier mâché.
-                …ack !
Une voix qui l’appelle dans le lointain, une main fraîche sur son front. Ouvre les yeux… Ouvre-les ! Jack essaya, mais il se sentait incroyablement faible. Que s’était-il passé ? Il n’en avait que de vagues souvenirs… Arhzel… blessé… Le calme glacial de Torja… Des crocs qui… 
-                AAAAH !
Jack se redressa violemment en hurlant, une main plaquée sur sa gorge. Ahanant, il chercha du regard son agresseur, mais ne rencontra que le visage inquiet de Jaide et Marlyne. La nymphe s’approcha de lui pour le soutenir. 
-                Tout va bien, ne t’en fais pas, le rassura-t-elle. Arhzel n’est pas là.
-                O… Où on est ?
Il faisait sombre ici et il régnait une odeur d’humidité désagréable. Une cave ?
-                Les Cadillac nous ont enfermé ici, grogna une voix masculine. J’ai tenté de nous sortir d’ici, mais peine perdue. On est enfermés comme des rats.
-                Séchar ?
Le cuisinier se laissa tomber près de lui, un sourire cynique sur les lèvres.
-                On dirait que t’as vu un mort, gamin. Tu me sembles plutôt patraque.
-                Ouais… Un peu…
Aurait-il rêvé ? Mais, plus important, que se passait-il ici ? Pourquoi étaient-ils enfermés ? Quoi ? Les Cadillac ? Les Cadillac les auraient enfermés ? Mais… 
-                Quel foutu merdier, soupira le cuisinier, résumant parfaitement la situation.
-                Je vous demanderai à tous de vous éloigner de la porte. Vous avez quelques secondes.
Tous sursautèrent. Cette voix provenait de l’autre côté de la porte ! Quelqu’un venait les délivrer ! Ils s’empressèrent d’obéir à ses ordres, mais Jack se sentait faible. Quand il tenta de se lever, ses jambes le trahirent et il retomba à terre. Le voyant, Séchar et Marlyne attrapèrent chacun un de ses bras pour le passer par-dessus leurs épaules pour le soutenir dans sa marche.
De l’autre côté de la porte, Torja perçut le bruit de leurs déplacements. Satisfait, il se saisit de la hache qu’il avait récupérer dans le local du jardinier et la fit tourner dans sa main un instant pour en tester le poids. Hum, pas mal. Il la garderait sûrement pour… au cas où… 
Il l’abattit sur la serrure qui sauta sans réel problème. Dès qu’il eut écarté le battant, les prisonniers s’extirpèrent de la cave. A sa vue, Jack pâlit. 
-                C’est Arhzel qui t’envoie, devina-t-il.
-                Oui. Suivez-moi sans faire un bruit.
-                … 
Bien que réticent, Jack n’en avait pas moins le choix. Où irait-il après tout ? Tant qu’il n’avait pas gagné son billet de retour pour son époque, le moyen le plus sûr de parvenir à ses fins était de demeurer auprès de son ancêtre.
Il emboîta donc le pas de Torja.

Arhzel savait qu’il le trouverait ici. Peter Twist se trouvait toujours au port. Soit près des docks, soit à la criée, soit sur un embarcadère, les jambes pendant dans le vide.
Toujours au port, dans ses habits sombres et avec sa palette de peinture. 
Et encore aujourd’hui, il n’échappait pas à la règle. Il s’était installé avec son chevalet près d’une frégate qui devait lever l’ancre au crépuscule. Son équipage était en train de charger des caisses qu’ils devaient transporter. Et lui les observait intensément, d’un regard sérieux et acéré, comme s’il analysait leur comportement.
-                Twist ! l’appela le vampire.
Il vit la main de l’ancien marin se crisper autour de son pinceau. Après un temps de réflexion, il abaissa ses doigts et leva son visage couturé de cicatrices sur l’opportun qui osait le déranger durant une séance de dessin.
-                Seigneur Arzhel, le salua-t-il d’un ton calme. Je vous pensais ranger dans une boîte à macchabée à cette heure.
-                C’est ce qu’on dit à mon sujet, en effet, sourit Arhzel, déçu, en réalité, de n’avoir même pas surpris son interlocuteur.
-                J’ai toujours dit que votre belle famille était un nid de vipères, soupira l’homme en reportant son attention sur sa toile. Alors ? Que viens-tu faire aujourd’hui ?
Le sourire du vampire s’accentua. Il se pencha en avant et réduisit sa voix à un murmure.
-                J’ai besoin du capitaine du Dragon rouge.
Le souffle de Peter Twist se suspendit un court instant. Mais il se reprit très vite et ses doigts noueux se saisirent d’un pinceau qu’il trempa dans du gris. Il peignait un ciel des plus orageux sur sa toile alors que, dans la réalité, un ciel magnifique s’étendait à perte d’horizon. 
-                Ce navire n’existe plus, répondit douloureusement le marin. Saisi et détruit par la milice des mers. Il n’en reste plus rien.
-                Oh vraiment ? soupira Arhzel d’un air faussement attristé, pleinement conscient de la souffrance qu’il causait à son interlocuteur. Et si je vous en offrais un, alors ? Un navire meilleur que Le Dragon rouge ?
Le regard de l’ancien marin changea. Il se leva brusquement et attrapa le vampire par le col de son coûteu manteau.
-                Ecoute-moi attentivement, seigneur Arhzel, souffla-t-il d’une voix basse et grave. J’ignore ce que tu me veux, mais je te conseille de ne pas jouer au plus fin avec moi. Dis-moi directement ce que tu veux.
-                Emmène-moi chez les Cadillac, de l’autre côté de la mer.
-                A la résidence principale des Cadillac ?
-                Oui. J’y serai bien aller par moi-même, ajouta-t-il avec un soupir, un sourire aigu sur les lèvres. Mais je pense que mes capacités de navigateur se résument à la lecture de cartes poussiéreuses, rien de plus. Ce qui, tu seras d’accord avec moi, est loin d’être suffisant.
-                Qu’ai-je à y gagner ?
-                Un navire. Une fois que je serai à bon port, tu pourras repartir avec le navire.
Une offre des plus… alléchante. Peter Twist relâcha le manteau du vampire qu’il considérait avec intérêt.
-                C’est tout ce que tu me demandes alors ? Que je te conduise en Dordogne ?
-                Rien de plus, juré.
L’ancien marin reporta son attention sur la frégate qu’il peignait jusqu’alors. Jamais il ne pourrait résister à une telle offre, Arhzel en avait parfaitement conscience. Un homme de la mer ne peut résister à l’appel des flots et des embruns salés.
D’ailleurs, quand il tendit sa main pour conclure l’accord, Arhzel avait déjà avancé la sienne pour la lui serrer. 

Et voilà ! J'espère que vous avez aimé, n'hésitez pas à commenter et partager l'histoire autour de vous ! Merci de continuer de me suivre ! 

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Et à quand la suite ?